
Journée mondiale de la langue maternelle : Qu’en pensent les habitants de Goma ?
La Journée de la langue maternelle est célébrée dans le monde entier le 21 février de chaque année. Elle a été célébrée pour la première fois en 2000, après avoir été proclamée par l’UNESCO. Elle est célébrée dans les États membres et au siège de l’UNESCO afin de promouvoir la diversité linguistique et culturelle et le multilinguisme.
Enseignant
Les langues maternelles ont beaucoup d’avantages et d’inconvénients dans le domaine de l’apprentissage a dit HAKIZIMANA LUSHOMBO Henri, enseignant de français et de latin au Lycée AMANI II dans la ville de Goma, dans une interview avec CONGORASSURE.CD
Ce dernier pense toutefois qu’il ne faut pas négliger la langue maternelle car dans le domaine de l’éducation, pour enseigner une langue étrangère à un élève, et pour que l’enfant puisse la comprendre, il faut avoir des informations suffisantes sur les fonctionnements vocaliques et consonantiques de sa langue maternelle. C’est-à-dire que, même si le règlement intérieur de l’école stipule que le français, l’anglais et le latin sont les langues admises à l’école, les langues maternelles ne doivent en aucun cas être mises de côté, car elles sont d’une grande importance dans le sens où elles permettent d’expliquer facilement et de faire comprendre à l’élève les langues étrangères déjà imposées dans le secteur éducatif.
Mais un autre élément important, dit cet enseignant, est que la langue maternelle permet à l’individu de s’identifier, malgré la langue étrangère parlée, à travers la langue maternelle il y aura des éléments culturels liés soit au ton, soit à la durée dans la prononciation des mots, ce qui permet de vous situer plus facilement dans l’espace et de dessiner votre origine. « Puisque la langue véhicule la culture, nous découvrons une personne à partir de sa façon de parler. »
En prenant l’aspect purement linguistique et scientifique, l’enseignant fait certes savoir que les langues se complètent, il y a certaines réalités qui sont difficiles à définir dans les langues étrangères, et ici la langue maternelle est utilisée pour faire comprendre à l’enfant la notion expliquée.
En ce qui concerne le négatif, il y a ce qu’on appelle l’interférence linguistique dans le discours, explique Mr Hakizimana. C’est-à-dire que comme les éléments sont incarnés dans les esprits, ils reviennent même en parlant la langue étrangère.
HAKIZIMANA LUSHOMBO Henri demande par conséquent aux parents de ne pas interdire aux enfants de parler leur langue maternelle. Ceci est très important car c’est dans ces langues que les enfants trouvent l’originalité de leurs cultures avant d’être emportés par les cultures véhiculées par les langues étrangères.
Selon lui, la langue maternelle doit rester une identification pour tous, malgré l’obligation de la langue étrangère dans les milieux éducatifs et dans les milieux administratifs.
Enfants (Élèves)
Certains des enfants interrogés par notre rédaction affirment avoir une certaine connaissance de la langue maternelle et tous confirment qu’ils considèrent le swahili comme une langue maternelle. Mais pour eux, il est difficile de parler cette langue (le swahili), et plus encore, il leur est strictement interdit de s’exprimer en swahili à l’école, et cela les suit jusque dans leurs foyers. LUMU BANZA Kingston et ASILA MUBAWA, respectivement des tribus Nande et Hunde au Nord-Kivu, pensent que la langue maternelle est la langue natale, mais ils ne connaissent rien des langues de leurs tribus. Tous, leurs réponses, « nos parents ne nous l’apprennent pas, nous n’en savons rien et maintenant seul le français est autorisé partout, ce qui n’est pas bon. Et même si on en savait quelque chose, on arriverait toujours à l’oublier parce que c’est interdit même au niveau de l’école », ont précisé ces écoliers de 6ème primaire de l’Ecole Communautaire du Lac (ECL).
Les parents
Le Dr ANDRÉ KABUDI, médecin de profession et père de plusieurs enfants (écoliers et élèves), a déclaré : « Il faut faire une distinction. Pour ma part, je parlerai de l’impact de la langue maternelle sur l’éducation de nos enfants en deux temps »
Du point de vue de l’instruction, le Dr André KABUDI est du côté de ceux qui pensent que l’enfant a l’obligation de bien connaître, et de maîtriser la langue française puisque c’est celle dans laquelle elle est enseignée, mais cela ne veut pas dire que la langue maternelle doit être négligée.
Ce sont nos sources, ce sont nos racines, c’est notre culture et il ne faut pas les déraciner pour éviter que l’enfant devienne un individu « quasi inutile » dans la société », a-t-il déclaré.
Il a fait référence aux grandes puissances qui émergent dans le monde, notant qu’elles ont dû revenir à leur culture même si leurs habitants parlent des langues qui leur sont également étrangères.
Pour lui, il ne devrait pas y avoir d’échelle de valeur entre les deux, elles ont leur importance, et il faut savoir quand utiliser chacune d’entre elles.
Il est à noter que pour cette année 2022, la Journée mondiale de la langue maternelle a été célébrée sous le thème « L’utilisation de la technologie pour l’apprentissage multilingue : défis et opportunités ».