
Une séquence vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux a ravivé le débat autour de la présence militaire Ougandaise dans le territoire de Mahagi, au Nord-Est de la République Démocratique du Congo. Dans cette vidéo, l’acteur politique Luc Malembe affirme que l’aérodrome de Zale serait sous le contrôle de l’armée Ougandaise (UPDF), suscitant une vague de réactions dans l’opinion.
Une clarification venue de la société civile
Face à l’ampleur des spéculations, la société civile de Mahagi, par la voix de son coordonnateur Innocent Wabekudu, a tenu à dissiper toute confusion. Selon lui, l’aérodrome de Zale reste placé sous la supervision de Caritas Développement Mahagi-Nioka, une organisation Congolaise active localement, et tous les services de sécurité de l’État y opèrent normalement.
« Les agents de l’ANR et de la DGM sont bien présents sur le site et assurent leurs fonctions sans interférence. La gestion de cette infrastructure n’est nullement déléguée à une force étrangère », a-t-il précisé.
Quant à la présence de soldats ougandais, elle serait limitée à un point de contrôle situé à proximité, destiné à surveiller les mouvements dans une zone considérée comme sensible sur le plan militaire. Wabekudu précise que la circulation civile reste autorisée jusqu’à 19 heures, au-delà de quoi des restrictions s’appliquent.
Une polémique révélatrice d’un climat de méfiance
Si les propos de Luc Malembe ont trouvé un écho auprès d’une partie de la population, c’est aussi parce qu’ils s’inscrivent dans un contexte marqué par une histoire tumultueuse entre la RDC et l’Ouganda, jalonnée de conflits armés, d’interventions controversées et de rivalités sur fond d’exploitation des ressources naturelles.
Depuis 2021, dans le cadre d’une opération conjointe lancée pour traquer les rebelles ADF, l’armée Ougandaise a été autorisée à opérer sur le sol Congolais, notamment en Ituri et au Nord-Kivu. Cette coopération militaire, bien que validée par Kinshasa, continue de susciter des inquiétudes quant à ses implications sur la souveraineté nationale.
« Il est regrettable qu’un incident d’ordre communicationnel alimente une telle polémique. Il est impératif que les acteurs publics s’appuient sur des faits vérifiés avant toute déclaration », a insisté Wabekudu.
Un besoin pressant de transparence et de communication officielle
L’affaire de Zale met en lumière les zones d’ombre entourant les accords bilatéraux de sécurité. Dans l’absence de communication régulière et structurée, le terrain est propice à la désinformation, aux malentendus, voire à l’instrumentalisation politique.
Des analystes appellent à une clarification du rôle des forces étrangères présentes sur le territoire Congolais, et à une implication accrue des autorités civiles et des organisations locales dans la supervision de ces opérations conjointes. Le manque de dialogue entre les forces déployées et la population favorise la méfiance, parfois amplifiée par les réseaux sociaux.
Vers une redéfinition du partenariat sécuritaire
Le cas de l’aérodrome de Zale, bien que localisé, illustre un défi bien plus vaste pour la RDC : trouver l’équilibre entre coopération régionale pour la paix et affirmation de la souveraineté territoriale. Dans un contexte de fragilité institutionnelle et d’enjeux transfrontaliers complexes, chaque malentendu prend des proportions nationales.
Il devient crucial, à l’avenir, de mettre en place des mécanismes clairs de transparence, d'information publique et de suivi indépendant, afin d’éviter que des initiatives militaires régionales ne se transforment en foyers de contestation ou de confusion.
Joël Heri Budjo