
En République Démocratique du Congo, une initiative menée par des femmes médiatrices formées par la MONUSCO a permis une avancée historique dans le territoire de Djugu. Pour la première fois en cinq ans, des représentants des communautés Hema et Lendu se sont réunis à Mandro pour renouer le dialogue et poser les bases d’une paix durable.
Le 03 juin 2025, la localité rurale de Mandro, située à 12 kilomètres de Bunia, a accueilli une rencontre inédite entre leaders communautaires des villages voisins de Mandro et Ezekere, longtemps divisés par des tensions intercommunautaires. Séparés par une simple rivière, ces deux villages n’avaient plus entretenu de relations depuis plusieurs années en raison des violences récurrentes entre les communautés Hema et Lendu.
Cette rencontre organisée par un réseau de femmes médiatrices de l’Ituri formées par la MONUSCO, visait à rétablir la confiance et encourager la reprise des échanges sociaux et économiques. Trente-six (36) leaders communautaires (dont 20 femmes) et cinq (05) autorités locales y ont pris part, aux côtés de représentants de la société civile et de la jeunesse.
Un moment de dialogue empreint d’émotion
L’initiative a donné lieu à des échanges francs et émouvants, où les participants ont exprimé leurs craintes, confronté leurs préjugés et formulé des propositions concrètes pour améliorer la cohabitation. Des exercices pratiques de médiation ont permis de mettre en lumière les traumatismes persistants et les besoins urgents des communautés.
« Quand j’ai annoncé à ma famille que je partais pour Mandro, ils étaient inquiets. Mais j’étais déterminée. Ce n’est pas normal d’avoir peur d’aller à la rencontre de ses voisins. Aujourd’hui, j’ai parlé avec les femmes de Mandro, on a partagé nos douleurs et nos rêves. Je reviendrai », témoigne Marguerite, secrétaire des femmes leaders d’Ezekere.
Pour Micheline, enseignante originaire de Mandro travaillant dans une école du groupement Lendu, ce rapprochement est un signe d’espoir : « Voir aujourd’hui nos deux Chefs de groupement assis côte à côte, se serrer la main, c’est un geste fort ».
Un appui décisif de la MONUSCO
Cette activité s’inscrit dans le cadre des efforts de la Mission des Nations-Unies en RDC (MONUSCO) pour promouvoir le dialogue communautaire en Ituri, en particulier à travers l’implication des femmes dans la médiation. Love Kitambo, l’une des facilitatrices, récemment formée aux techniques de Tierce Partie Neutre (TPN), souligne l’importance du travail préparatoire : « Nous avons organisé des pré-médiations, identifié les blocages, permis à chacun d’exprimer ses ressentis. Ce jour-là, nous avons vu des larmes, mais aussi des sourires. Une femme m’a confié qu’elle ne trouvait plus de bons couteaux pour cuisiner, car ils ne sont fabriqués qu’à Ezekere. Cela montre à quel point les liens du quotidien ont été rompus ».
Recommandations et perspectives
À l’issue de cette journée, les participants ont appelé à l’accélération du Programme national de désarmement, démobilisation, réinsertion communautaire et stabilisation (P-DDRCS), à l’intégration de l’éducation à la paix dans les écoles, ainsi qu’à la poursuite des médiations et actions de détraumatisation, en particulier en direction des femmes et des jeunes.
En soutenant les initiatives locales et en renforçant les capacités des acteurs communautaires, la MONUSCO joue un rôle clé dans la reconstruction du tissu social en Ituri. Cette rencontre à Mandro en est une illustration : au-delà des discours, ce sont les gestes simples une poignée de main, un regard échangé qui amorcent le chemin vers une paix durable.
Joël Heri Budjo